Dimanche 27 mars
Après 4 jours à l'USA Hostel à San Diego, auberge de jeunesse simpliste mais très sympa où j'ai trouvé Gilles et David, deux suisses qui vont aussi faire le PCT, nous sommes pris par les Trail Angels Scout & Frodo (les Trails Angels, TA pour faire court, sont des gens qui, par simple bonté, offrent aux marcheurs qui un toit, qui un repas ou des friandises, qui un transport aux points de ravitaillement) . Chez eux, nous rencontrons 6 autres marcheurs. Je suis prêt, et je partirai dès demain avec eux.
Lundi 28 mars - 32km mi 20
Réveil à 5h pour arriver au Départ du PCT à 7h. Photos de départ et c'est parti. Temps très frais, nuageux. Le désert est plein de plantes en fleur. Longue étape de 32km sans eau mais comme il fait frais, nous n'avons pas beaucoup de besoins; nous marchons vite, sans doute trop, et arrivons vers 15h30 après une seule vraie montée. Beaucoup de vent, pas chaud. J'ai pas compris le fonctionnement des robinets américains et la douche a été plutôt fraiche. Nuit de pluie et de vent dans un camping, mais la tente ne laisse rien passer.
Mardi 29 mars - 29km mi 38
Départ à 7h seul. Journée couverte, venteuse et froide. Collines de buissons, sable. Arrêt à 15h pour ne pas trop fatiguer, camp moyen avec vent. Faudra prendre un rythme plus lent pour ce début: suis allé trop vite et trop loin, entraîné par les autres.
mercredi 30 mars 29Km mi 56 - Laguna
Réveil sous la neige! Quelques cm seulement qui collent aux arbres: magnifique et froid. Passage par Mt Laguna pour un café/petit déj et récupérer ma première boite de ravitaillement. J'ai pris trop de bouffe et j'en laisse dans la Hiker Box (boite où les marcheurs déposent leur trop plein et se servent gratuitement s'ils trouvent quelque chose à leur goût). Trop tôt pour s'arrêter, je continue. La suite de la journée est dépourvue d'eau. Magnifiques vues lointaines. Déjeuner et eau dans un camp de vacances fermé, chute sans gravité sous un sac lourd d'eau et je campe sur une crête de sable avec de belles formations rocheuses un peu avant le camp indiqué sur la carte pour avoir la paix. Pas trop de km aujourd'hui avec l'arrêt à Mt Laguna et trop d'eau portée, mais j'ai toujours peur d'en manquer.
Jeudi 31 mars, 34km, mi 77
Lever de soleil splendide après un peu de pluie gelée en début de nuit. Aujourd'hui longue étape de désert à cause du manque d'eau et à l'arrivée au camp sous un pont, eau et ... bière laissée là par un TA!
Vendredi 1er avril 34Km, mi 98
Bonne nuit; Remontée dans les montagnes d'en face, nettement plus désertiques. Le PCT se tortille dans tous les sens, à croire qu'ils ont tenté d'y placer le maximum de distance entre deux points. Comme souvent, peu d'eau: 23km, puis 16km entre les points d'eau. Je voulais faire 40km pour être sûr d'arriver à Warner Spring avant la fermeture de la poste, mais l'avant de la cheville droite est gonflé et me fait mal: piqûre ou élongation, je ne sais pas. Arrêt donc au bord du chemin: belle vue, belle nuit, il fait doux.
Samedi 2 avril 20km, mi 110 - Warner Spring
Je voulais démarrer à 5h pour rattraper le temps perdu hier, loupé: pas entendu le réveil et départ à 6h. J'essaye d'avancer vite pour arriver avant la fermeture de la poste pour le weekend mais ma jambe droite gonfle et me fait vraiment mal; il y a comme un grésillement sur les tendons à l'avant de la jambe à la flexion. J'espère que ce n'est pas grave, mais je ne sais toujours pas ce que c'est et je boite de plus en plus. Le terrain est très facile, de grande plaines herbeuses et plates avec des ruisseaux. Arrivée à Warner Spring juste à temps à 11h30: récupération de la boite de ravitaillement à la poste et camping au très sympa Centre communautaire qui accueille les marcheurs. Un breton marié localement m'invite à déjeuner, douche comprise. On verra l'état des troupes demain.
Dimanche 3 avril, 0km, mi 110
Ma jambe a doublée de volume et je boite bas. Jour de repos donc. D'après les locaux, j'ai sans doute été piqué par une araignée, ce qui aurait provoqué un œdème qui aurait compressé les tendons et provoqué une forme de tendinite. Je prends des anti-inflammatoires et ça fait moins mal. Journée sympa à discuter avec les gens du Centre et avec les autres marcheurs. J'aide un jeune type qui a un sac de presque 30Kg à se débarrasser de l'inutile, mais il a du mal à lâcher prise: c'est le matériel de son papa lorsqu'il était dans l'armée!
Lundi 4 avril, 8km, mi 118
Toute petite journée pour s'y remettre avec la jambe encore gonflée et douloureuse. Remontée vers les Mt San Bernadino à travers un maquis dense. J'y vois mon premier buisson de chêne empoisonné (Poison Oak), un arbuste américain fortement urticant, gentiment signalé par un écriteau. Camp au bord d'un petit ruisseau où je peux me baigner, sous de vieux chênes verts: paradisiaque. J'y essaye mon réchaud à bois: ça fonctionne bien, mais c'est plus lent et ça salit horriblement la casserole: j'aurais dû faire comme les Népalais et l'enduire de boue avant de la mettre sur le feu, mais j'y ai pensé trop tard. En tous cas, le réchaud à bois me semble peu compatible avec les longues étapes du PCT et ses courtes pauses: je le renverrai à la première occasion et je conserverai le gaz.
Mardi 5 avril, 31km, mi 134
Départ 6h30, je deviens plus matinal. Longue montée de 600m bien à l'ombre, au frais, avec un soleil voilé très agréable. Pas d'eau avant 19 km chez Mike's, un Trail Angel qui habite un surprenant bric-à-brac au milieu de nulle part, une vrai réserve de soixante-huitards carburant au H. Très sympa, me rappelle Katmandou dans les années 80s, mais j'ai pas très envie de voir du monde bruyant, alors je continue en portant 5l d'eau pour un camping sans eau. Ma jambe souffre de l'effort, gonfle et me fait mal en fin d'après-midi: il faudra que je la laisse repose à Idyllwild, la prochaine ville. Rencontre avec mon premier crotale, de belle taille, en travers du chemin: il n'a pas l'intention de bouger et je dois le pousser sur le côté avec un longue branche car le maquis est trop dense pour le contourner: heureusement que les crotales ont mauvais caractère et sonnent dès qu'ils entendent quelqu'un, car leur camouflage est efficace. Je campe, mal, dans une boucle du sentier. Une cavalière, la première, passe vers 6h.
Mercredi 6 avril, 29km, mi 152 - Paradise Corner Café - Idyllwild.
Très bonne nuit malgré l'emplacement moyen. Du désert encore, mais avec une splendide végétation en fleur et un ciel qui se voile après deux heures de grosse chaleur: le parapluie aluminisé est une excellente idée, il fait nettement plus frais dessous. La jambe va mieux, loin d'être parfaite, mais je ne crains plus qu'elle me force à abandonner, ce qui aurait été enrageant si près du départ. Beaucoup de montées et descentes sur cette section et très peu de monde, juste deux marcheurs. La plaine est parsemée de cabanes et de serres en plastique: renseignements pris, il s'agit de plantation illégales de H dont il ne vaut mieux ne pas trop s'approcher. Arrivée vers 15h à la route d'Idyllwild où je fais du stop pour contourner une section du PCT interdite pour cause d'incendie. Je suis pris en 10mn par un conducteur qui me laisse à la porte de l'Idyllwild Inn où je prends une chambre pour deux nuits. Charmante pette ville touristique aux maisons très variées. Je retrouve des copains qui sont partis en même temps que moi: Gilles, David, Olaf et Matt, avec qui je dîne.
Jeudi 7 avril. 0km, mi 152
Jour de repos, ravitaillement, bouffe et lessive. Le mauvais temps semble s'installer pour 3-4 jours.
Vendredi 8 avril, 29km, mi 191
Départ en groupe vers 7h: 2 canadiens jeunes et très rapides, Gilles, David, Matt et Olaf. Il y a 11km de montée pour rejoindre le PCT en haut de la crête qui surplombe Idyllwild et passe par le Mt San Bernadino. Nous montons parmi d'énormes pins, avec deux passages à 2700m. Il bruine/pleut toute la journée, qui est dure: rythme rapide, peu de repos, beaucoup de passages enneigés, froid, chaussures trempées. On est bien contents de trouver un large terrain pour camper vers 16h30: enfin se mettre au sec et manger chaud. Nuit pluvieuse.
Samedi 9 avril, 32km, mi 211 - Big Bear Lake.
Matin ensoleillé et magnifique descente de 2.000m par de très, très larges lacets: plus de 24km pour en faire à peine 5 à vol d'oiseau! C'est un peu agaçant de marcher 2 km pour se retrouver quelques dizaines de mètres plus bas sur un terrain qui aurait facilement permis de couper. Vues magnifiques commençant par une forêt alpine et se terminant dans le désert. Rencontre d'une équipe de volontaires du PCT qui entretiennent le chemin: tout se fait à la main. Nous descendons vers une large vallée qu'il faudra traverser; en bas, un robinet d'eau, le seul du jour, est surveillé par une caméra vidéo! Puis viennent les 10km de la vallée, balayée par un vent puissant; d'ailleurs, il y a plein d'éoliennes. La pluie menace, mais j'arrive juste à temps chez les Trails Angels Ziggy and the Bear: TA sympas, mais un peu ancien militaire. Les prochains 90km du PCT sont interdits pour cause d'incendie sans chemin alternatif possible. Les autres arrivent et, coup de chance, nous trouvons un chauffeur qui, pour une somme modique, nous conduira de l'autre côté de la zone interdite le soir même. Nous roulons de nuit, avec un arrêt pour engloutir un gigantesque bourrito, jusqu'à Big Bear Lake où nous partageons une chambre dans un petit hôtel.
Dimanche 10 avril, 0km, mi 275
Ravitaillement, bouffe et repos. Beaucoup de magasins sont ouverts le dimanche, mais pas la poste: tant pis pour les cartes papier que je m'étais envoyées là: je les ai aussi sur mon téléphone portable et cela suffit bien car il faudrait être aveugle pour perdre le chemin. J'ajuste mon menu aux envies: exit le beurre de cacahouète, moins de bonbons, plus de barres aux céréales, et des ziplocks. Très commode, les ziplocks: ces sachets de congélation refermables permettent de réhydrater la bouffe sans salir la gamelle qui ne sert plus qu'à chauffer l'eau. Découverte aussi du jerky, la viande séchée américaine: pas très calorique, mais gouteuse.
Lundi 11 avril, 35km, mi 294
Départ en bus à 7h30 et longue sortie de la ville car il faut contourner le lac pour retrouver le PCT au mile 275. Journée magnifique, rapide et facile avec peu de dénivelé et un bon chemin. 3 heures d'une petite pluie plus agréable que gênante dans des paysages granitiques de forêt incendiée, le lac de Big Bear en dessous, puis descente le long d'un petite vallée facile et arrosée. Camping parfait à 16h30 avec le temps de se laver un peu (toujours sans savons pour ne pas polluer l'eau des ruisseaux), de faire un feu de camp et de discuter des mérites de chaque diète. Pour la première fois depuis dix jours, je n'ai pas eu mal à la jambe droite: youpi!
Jours de marche : 12 (dont 1 néro - jour à moins de 20km)
jours de repos: 3